Ligne Bois est un centre d’animation et de valorisation du bois dans la construction au sein de la filière forêt-bois wallonne. Nous sommes aussi un groupement d’entreprises qui rassemble plus d’une centaine de membres (fabricants, constructeurs, architectes, bureaux d’études, etc.) du secteur. À ce titre, nous sommes bien placés pour juger des avantages environnementaux, techniques, esthétiques et financiers de la construction bois. Et pour déplorer les freins culturels qui entravent encore le développement de cette filière pourtant garante de constructions plus durables.
La construction bois a assurément le vent en poupe, portée par des entreprises dont le savoir-faire est reconnu à l’étranger et qui ont consenti d’importants investissements pour se doter d’outils de production ultramodernes.
Toutefois, même si on en parle de plus en plus, la part de constructions bois reste encore marginale en Belgique. En 2022, les constructions bois représentaient un peu moins de 7 % du volume des nouvelles constructions. Certes, des éléments conjoncturels (tels que la crise sanitaire, l’inflation, la hausse des taux d’intérêt, etc.) ont affecté le secteur de la construction bois qui, avant la crise du Covid, représentait encore 11 % des constructions neuves. On est toutefois loin du potentiel que les entreprises spécialisées pourraient mettre en œuvre si la demande suivait.
On peut d’ailleurs légitimement s’étonner de ce que la demande évolue aussi lentement chez nous, notamment en matière de bâtiments publics. En effet, le secteur du bâtiment, dans son fonctionnement actuel, a un impact très négatif sur l’environnement : c’est l’un des plus grands prédateurs de ressources, l’un des plus grands consommateurs d’énergie primaire, l’un des plus grands émetteurs de CO2 et le plus grand producteur de déchets. Or, le pacte vert pour l’Europe s’est fixé comme objectif la neutralité carbone d’ici 2050. Ce qui est littéralement impossible si on reste sur les mêmes bases !
Il est avéré que les bâtiments peuvent passer de « source de carbone » à « puits de carbone », pour peu que des matériaux de construction biosourcés comme le bois soient plus massivement utilisés. En effet, les produits de construction en bois stockent le CO2, absorbé par les arbres durant leur croissance, pendant toute la durée de vie d’un bâtiment (et bien plus encore si ces matériaux biosourcés sont récupérés et réemployés).
Le bois est le principal matériau de construction biosourcé utilisable en structure et, donc, à même de concurrencer le béton et l’acier. Selon le dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), sur le plan des émissions de CO2, la transformation du bois en matériau de construction est jusqu’à trente fois moins polluante que la transformation du béton et plusieurs centaines de fois moins polluante que la transformation de l’acier. Le bois devrait donc naturellement s’imposer comme le matériau de référence dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.
Mais pour cela, il est impératif que les prescripteurs soient correctement formés et informés. Et il faut bien admettre qu’on est loin du compte. Dans le cursus de l’architecte (et de l’ingénieur), les cours relatifs au matériau bois sont inexistants ou réduits à la portion congrue. Ceux qui désirent s’initier à la construction bois doivent dès lors se former sur le tas au terme de leurs études. On peut raisonnablement penser que, à très court terme, la connaissance des spécificités des matériaux de construction biosourcés, à commencer par le bois, résultera moins d’un choix que d’obligations réglementaires.
Il serait dès lors judicieux d’adopter une approche proactive plutôt que de subir la situation.
Aurore Leblanc,
coordinatrice de Ligne Bois